Les mutations contemporaines de la civilisation négro africaine

Un griot dans l'Afrique traditionnelle

Introduction

L’Afrique, centre principal de la civilisation négro-africaine présente une grande diversité : multitude de langues, de systèmes politiques, de coutumes, de genres de vie, émiettement de groupes humains etc. Mais au cours des siècles, cette diversité culturelle et ces valeurs spécifiques au continent noir vont subir des mutations. 

I- LES GRANDS TRAITS DE LA CIVILISATION NEGRO-AFRICAINE PRECOLONIALE

1) Des entités territoriales politiquement très structurées

a) Les sociétés étatiques

Les empires et les royaumes : ils englobent des territoires plus vastes et des populations plus nombreuses. Nous pouvons citer l’empire du Ghana, l’empire du Mali, le royaume Mossi, le royaume Ashanti, le royaume du Dahomey, L’empereur ou le roi est un personnage sacré, un être divin qu’il est parfois interdit de voir. On lui attribue des pouvoirs surnaturels : exemples : l’empereur du Mali (le Mansa), le roi Ashanti (l’Ashantihene), le roi mossi (le Mogho-naaba), le faama dans les royaumes bambara de Ségou.                  

Certaines entités étatiques sont fondées sur des principes religieux notamment islamiques : ce sont des États théocratiques où le pouvoir est exercé au nom de Dieu. On les appelle des sultanats et des émirats (Emirat de Kano). L’émir ou le sultan vient souvent de l’ethnie conquérante convertie à l’islam

 

b) Les sociétés non étatiques

 

Il s’agit des chefferies qui sont des entités territoriales de moindre dimension que les empires et les royaumes. Elles se sont construites généralement sur la base des lignages, des tribus ou clans et des villages. Le chef peut être l’un des bâtisseurs du village ou un de ses successeurs. Il peut être aussi désigné en remplissant des critères (âge, sagesse, équité, force, richesse…). Certaines sociétés sont reparties par classe d’âge. Le pouvoir est rotatif et limité dans le temps (chaque classe d’âge a sa période d’exercice du pouvoir). C’est une forme très évoluée de la démocratie. Exemple : les peuples lagunaires de Côte d’Ivoire.

Rappelons que dans les sociétés étatiques comme non étatiques, il existe des éléments démocratiques qui permettent de limiter ou tempérer le pouvoir absolu des souverains et chefs. Nous pouvons citer entre autres :

Les conseils politiques ou l’arbre à palabres : c’est là que sont examinés les problèmes collectifs et où la population peut participer à la discussion. Ces palabres limitent donc le pouvoir central.

Les griots : ils sont nombreux dans les pays africains de civilisation musulmane. Ils chantent certes les noms des personnages importants, mais ils peuvent aussi les défaire. Ils ont donc un pouvoir redoutable, et ils sont souvent craints par l’autorité politique.

Les maîtres de la terre : Descendants des anciennes populations locales soumises par les ancêtres de la dynastie dominante, ils sont chargés de la protection et de la prospérité de la communauté. Ils parviennent ainsi à imposer leur volonté aux chefs politiques.

Les alliances interethniques : elles sont sacrées. Leur but est de renforcer l’harmonie, la symbiose entre les différents peuples et surtout endiguer les guerres.

2) Une vie sociale très communautaire

a) La notion de la famille

Elle se compose d’un grand nombre de personnes venant d’un même ancêtre. A l’intérieur de cette grande famille, il existe des familles restreintes (famille-ménage ou famille-foyer). Ces petites familles sont différentes de la famille en Occident car elles sont souvent composées d’un mari, de plusieurs épouses et de nombreux enfants et plusieurs autres proches parents.

b) Les normes sociales

La solidarité : l’appartenance à une même parenté crée un lien profond de solidarité entre les membres. L’aide est apportée aux parents proches ou lointains. Les biens appartiennent à la communauté ; la solidarité, le partage et l’entraide sont sacrés, très pratiques au quotidien. La gestion des descendants est lignagère dans les sociétés traditionnelles africaines. La prise en charge des enfants n’était pas l’apanage exclusif des parents biologiques. La famille au sens large, grands-parents, oncles et tantes, autres membres du lignage ont coutume d’y contribuer par le système du confiage des enfants. Cette pratique permet non seulement de répartir la charge démographique des descendants d’un lignage, mais elle atténue la personnalisation des relations des parents biologiques avec leurs enfants et renforce la conscience communautaire chez les individus.

La hiérarchie : les relations entre individus sont très hiérarchisées ; par exemple, l’aîné est supérieur au cadet et l’homme, à la femme.
Le savoir : Les sociétés africaines sont en général basées sur la gérontocratie. La sagesse, le savoir et l’autorité appartiennent aux plus anciens. L’expérience et la connaissance sont acquises à travers des rites d’initiation, des mises à l’épreuve qui forgent le caractère, le courage et la personnalité de l’individu.
Le mariage : le mariage n’est pas forcement l’union de deux personnes mais avant tout l’union de deux grandes familles. En règle générale, le jeune homme ne choisit pas lui-même sa fiancée car celle-ci peut être désignée dès sa naissance par le chef de famille. Le jeune homme doit faire une prestation matrimoniale (la dot) aux parents de sa fiancée en nature ou en espèce. Cela limite les divorces car la famille de la fiancée est tenue de rembourser la prestation. La polygamie est une pratique courante. Sa justification est d’ordre économique, social ou religieux.
Le mode de succession : il varie selon l’appartenance à un groupe patrilinéaire ou matrilinéaire. Par exemple, chez la plupart des peuples Akan en Côte d’Ivoire, la femme est l’élément central du pouvoir royal, symbole de la stabilité du foyer familial et garante du mode de succession matrilinéaire. Les enfants des sœurs sont par conséquent les héritiers de droit de leurs oncles maternels. Ce principe est valable aussi bien dans l’héritage des biens que dans la transmission du pouvoir monarchique.

3) Une économie de subsistance très diversifiée

a) Les activités primaires

Les activités économiques en Afrique noire comprenaient la cueillette, l’agriculture, l’élevage, la chasse, la pêche, la récolte de sel, l’exploitation des gisements d’or, de fer etc.

La cueillette était une activité quasi générale, elle se concentrait entre autres, sur la récolte des noix de kola dont les arbres poussaient à l’état sauvage dans les régions forestières et sur la noix de karité dans les zones de savane.

L’agriculture est la base de l’économie traditionnelle. C’était une agriculture de subsistance (tournée vers la satisfaction des besoins familiaux). Les surfaces exploitées et la terre appartiennent, en général, à la collectivité villageoise. Cette agriculture utilisait des méthodes et techniques agricoles traditionnelles : La culture itinérante sur brûlis, la polyculture extensive, la jachère, le buttage des parcelles, l’utilisation d’engrais biologiques etc. Aussi, les rendements sont faibles.

L’élevage était bien pratiqué dans toutes les régions, particulièrement les zones de savane et de steppes.  Et il en existe deux types :

– L’élevage du petit bétail. Il se présente comme une activité d’appoint pour les peuples cultivateurs. C’est un élevage domestique réalisé dans le cadre familial (volailles, petits ruminants comme les ovins et caprins).

-Le gros élevage qui portait particulièrement sur l’élevage bovin, dans les régions de savanes et de steppes. C’est la spécialité des peuples nomades tels que les peuls en Afrique occidentale et les Massaïs en Afrique orientale et australe.

La pêche était la principale activité des peuples du littoral tels les Ewe, les Fante, les Nzima, les lagunaires etc. Quant à la chasse, tous y participaient, armés d’abord de javelots, de gourdins, d’arcs et de flèches.

Nous avons aussi les activités d’extraction qui acquirent une extrême importance entre 1500 et 1800 en Afrique noire. Le sel était produit aussi bien par les habitants du littoral que dans les salines sahariennes notamment celles d’Awlil, d’Idjil et de Teghaza. De même, l’exploitation aurifère était le domaine réservé à la population des zones forestières de l’intérieur. L’exploitation des gisements de fer était plus assurée par les populations des régions de savane et sahéliennes.

b) une industrie artisanale prospère

Les trouvailles archéologiques montrent que, les sociétés africaines en général et en particulier celles de la côte guinéenne maîtrisaient parfaitement les arts et métiers de la poterie, de la gravure et de la sculpture (sur bois, sur ivoire et en argile), les métiers du tissage, de l’orfèvrerie et de la fonte d’objets (en bronze, en cuivre et en or).

Incontestablement toutefois, c’est dans l’orfèvrerie et la fonte, notamment d’objets en or et en laiton, que les peuples de la côte de la Guinéenne en général, et notamment les Akan, excellèrent tout particulièrement. Les orfèvres, utilisant essentiellement la méthode de la cire perdue pour produire des objets d’une finesse exquise : poignées de sabres, bagues, chaînes et diadèmes, essentiellement en or et en argent.

C’est au XVIIIe siècle que l’art du tissage a atteint chez les Akan et les Ewe, sa pleine perfection, ce dont témoignent les tissus multicolores Kente des Akan, aujourd’hui réputés, et les somptueuses étoffes adanudo des Ewe. La spécialisation classique des tâches a abouti à la formation des castes : Les castes des forgerons, des cordonniers, des tisserands, des potiers, des sculpteurs…

c) Des échanges commerciaux intra-communautaires denses

L’Afrique noire comportait un réseau complexe de routes commerciales principales et secondaires. Cette multiplication des routes favorisa l’émergence d’un certain nombre de centres urbains généralement situés le long des grands axes et servant d’entrepôts, de marchés ou de terminus, tels Tombouctou, Ouagadougou, Bobo-Dioulasso, kong, Buna (dans le nord) Tiassalé, Krinjabo, Kumasi dans le sud. Les produits commercialisés portaient sur l’or, les noix de kola, les esclaves, le sel, les textiles. Le commerce lointain tel que le commerce transsaharien utilisait des monnaies plus importantes comme la poudre d’or. Les échanges courants étaient assurés par un système de troc. Les cauris servaient de monnaies traditionnelles la plupart des transactions dans plusieurs régions. Certaines populations utilisaient comme monnaies, des objets d’utilisation directe comme les barres de sel, la natte de raphia, les étoffes, le cheval etc.

4) Une vitalité religieuse et culturelle

a) L’animisme, première religion traditionnelle des africains.

En général, toutes les religions noires reconnaissent un Dieu suprême dont le nom varie d’un peuple à un autre, mais s’adressent rarement à lui. Par contre, les dieux de la nature, les ancêtres et les génies sont souvent invoqués, le Dieu suprême étant très loin des hommes. Dans ces religions traditionnelles, on croit aux forces surnaturelles et on se protège donc avec les fétiches et on adore les éléments de la nature (cours d’eau, arbres, montagnes, animaux…). L’homme parle aux dieux de la nature, aux ancêtres et aux génies à travers la pratique des rites dont le plus important est le sacrifice. Les prêtres et les guérisseurs sont les intermédiaires entre les dieux et les hommes.

L’islam, à l’œuvre depuis le VIIIe au moins, a accentué son influence dans les grands empires du Soudan depuis celui du Ghana jusqu’à celui de Gao. Cette religion n’a cessé de s’étendre en Afrique subsaharienne de diverses et nombreuses façons: par le biais des commerçants, des hommes de prière et par la violence au besoin. Il y eut certes des obstacles et des résistances à sa pénétration surtout dans les régions forestières mais son succès s’explique en partie par le caractère de cette religion qui s’accommode bien avec les habitudes des africains (polygamie, divorce, soumission de la femme, respect de l’aîné, solidarité…). Ainsi, l’islam a été fortement influencé par des pratiques mystiques locales : c’est l’Islam noir porté vers le maraboutage, un syncrétisme religieux né de la fusion des pratiques islamiques et des traditions animismes africaines.

b) L’oralité, principal vecteur de conservation et de transmission du savoir

Les civilisations négro-africaines étaient en général des civilisations de la parole, même si l’écriture était connue depuis le XVIe siècle en Afrique occidentale. La tradition orale africaine ne se limite pas à des contes et légendes ou même à des récits mythiques ou historiques et les « griots » ne sont pas les seuls et uniques transmetteurs qualifiés. Les grands dépositaires de cet héritage oral sont ceux que l’on appelle les « traditionalistes ». Mémoire vivante de l’Afrique, ils sont les meilleurs conservateurs des secrets de la création cosmique et des sciences de la vie. Les traditionalistes, doués en général d’une mémoire prodigieuse, sont souvent aussi les archivistes des événements passés transmis par la tradition, ou des événements contemporains. Ils se retrouvent dans toutes les sociétés négro-africaines.

Après les traditionnalistes, nous avons les griots. On peut les diviser en trois catégories :

— les griots musiciens, qui jouent de tous les instruments (monocorde, guitare, cora, tam-tam, etc.). Souvent merveilleux chanteurs, ils sont conservateurs et transmetteurs des musiques anciennes en même temps que compositeurs ;

— les griots « ambassadeurs » et courtisans, chargés de s’entremettre entre les grandes familles lorsqu’il existe des différends. Ils sont toujours attachés à une famille royale ou noble, parfois à une seule personne ;

— les griots généalogistes, historiens ou poètes (ou les trois à la fois) qui sont aussi généralement conteurs et grands voyageurs, et pas forcément attachés à une famille.

De nombreux facteurs, religieux, magiques ou sociaux, concouraient à préserver la fidélité de la transmission orale.

Le champ d’action des griots est plus perceptible dans les sociétés manding et bambara du Soudan occidental.

c) De diverses et dynamiques expressions culturelles

Diverses compétences artistiques et culturelles (chant, musique, danse, art oratoire, etc.), sont enseignées et transmises depuis le cercle familial puis dans les sociétés secrètes ou initiatiques. Elles s’expriment et se perfectionnent dans le temps à travers les cérémonies (funérailles, mariage, danses de masques, rites initiatiques, festivités, cérémonial royal etc.). Les principaux instruments de musique sont dans l’Afrique traditionnelle sont entre autres, le tambour, le balafon, la flûte, le cor, la castagnette, le grelot etc.

II- LES BOULEVERSEMENTS SOCIO-CULTURELS A LA FAVEUR DE LA COLONISATION

1) Les facteurs des mutations dans les sociétés africaines

L’Afrique noire va connaître de profondes mutations à la faveur de son contact avec les Etats de l’Europe. La colonisation du continent qui sera consécutive à ce contact va susciter de nombreux facteurs qui vont provoquer ces bouleversements sociopolitiques, économiques et culturels.

L’introduction de l’école occidentale en Afrique noire, l’utilisation d’un nouveau système monétaire dans les échanges commerciaux, l’urbanisation rapide et l’introduction du christianisme constituent les principaux facteurs des mutations en Afrique noire que la colonisation a apportés.

2) La mutation des structures politiques

La colonisation et l’avènement des indépendances vont entraîner d’importants bouleversements dans le mode d’organisation politique des peuples africains. Les puissances colonisatrices ont créé des États artificiels sans tenir compte de l’homogénéité culturelle et du passé historique des peuples qui ont mis des siècles à se constituer. Ces nouveaux Etats ont été créés en suivant principalement les intérêts des puissances colonisatrices. C’est ce qui explique en partie les conflits inter ou intra- Etats, les nations ayant tendance à se reconstituer ou à revendiquer des intérêts communs. On a assisté ainsi à un démembrement des royaumes et même des lignages. Ce qui entraîne un affaiblissement de l’autorité des chefs traditionnels qui sont devenus de simples agents d’exécution, des subordonnés de l’administration moderne.
Au lendemain des indépendances, la naissance d’États modernes délimités par des frontières, dotés d’institutions républicaines copiées sur celles de l’Europe, achève cette phase de mutations politiques négro-africaine. Désormais l’on parle d’État indépendant et souverain, de démocratie, de partis politiques, d’élections, le mode de désignation de chefs etc.

3) Le bouleversement des valeurs sociales

La colonisation et les indépendances vont profondément et de façon irréversible bouleverser les valeurs sociales qui ont toujours caractérisé les peuples africains.

L’individualisme remplace la vie communautaire. La famille élargie cède de plus en plus la place à la famille nucléaire ou au couple de type occidental.

L’apparition de nouvelles classes socio-professionnelles comme les fonctionnaires, les ouvriers, les manœuvres, les commerçants. Les castes lentement se sont effacées de l’organisation socioéconomique.

Le déclin de certains fondements traditionnels comme la solidarité, la polygamie, le mariage traditionnel avec le paiement de la dot, les alliances interethniques.

L’argent devenu le critère absolu de toute valeur s’est substitué aux vieilles valeurs symboliques. La hiérarchie, la sagesse et le prestige ne sont plus fonction d’un statut au sein de la société mais plutôt de l’argent qu’on possède.

Le recul de la succession traditionnelle au profit de la succession légale. Le matriarcat est aboli en Côte d’Ivoire au profit de la succession légale patrilinéaire.

La possibilité de s’instruire avec l’accès aux écoles et universités pour les enfants des deux sexes. Conséquences : le savoir qui était autrefois lié à l’expérience et à l’âge est aujourd’hui entre les mains des jeunes. Les personnes âgées avec leur savoir et leur sagesse sont taxées d’ignorantes parce qu’elles ne savent ni lire ni écrire dans la langue officielle d’origine étrangère. La scolarisation et l’autonomisation de la femme l’a amenée à  s’émanciper dans la nouvelle société (égalité du genre).

4) La mutation des structures économiques

La grande mutation est le passage d’une économie de subsistance à une économie de marché avec une large ouverture de celle-ci sur le marché international. Conséquence, les économies négro-africaines sont désormais soumises aux aléas du marché international auxquels elles s’adaptent difficilement. L’intégration de l’Afrique au commerce international avec ses règles et normes complexes, va progressivement déstructurer l’organisation commerciale intra-africaine traditionnelle. La monétisation moderne de l’économie a fait disparaître le système traditionnel de troc.

Dans le secteur agricole, les méthodes et techniques agricoles modernes se vulgarisent, ce qui augmente significativement la productivité et les rendements à l’hectare. On assiste au développement d’une agriculture commerciale avec de nouvelles plantes spéculatives (café, cacao, hévéa…). La conséquence du développement de ces cultures est le délaissement des cultures vivrières, ce qui engendre le problème de l’autosuffisance alimentaire. De plus, les plantations de ces cultures pérennes occupent de vastes superficies et cela pose de plus en plus le problème de l’insuffisance des terres.

Au niveau de la production industrielle, le contact avec l’Europe et la colonisation vont freiner les efforts créatifs des peuples africains. L’importation en Afrique de quantité d’articles de grande consommation par les européens va défaire le tissu industriel africain et l’empêcher de se consolider.

5) Les mutations religieuses et culturelles

L’implantation du christianisme en Afrique noire avec la colonisation va profondément bouleverser le paysage religieux traditionnel africain. Introduite par les missionnaires européens véritablement au XXème siècle, le christianisme apparait dès l’origine comme un aspect de la colonisation et cela ne favorise pas son expansion. Mais depuis les indépendances, sa progression est rapide à cause de ses œuvres à caractère social (écoles, hôpitaux, assistance sociale…).

Si la religion islamique africaine se maintient dans ses pratiques traditionnelles et ne subit pas de réelles mutations au contact des européens, il n’en est pas ainsi de l’animisme, religion traditionnelle de l’Afrique noire.

En effet, l’expansion du christianisme va contrarier et combattre l’enracinement de l’animisme, considérée comme non salutaire et mystique et rétrograde. On assiste à un délaissement progressif des pratiques animistes sous l’effet de l’urbanisation, de la modernisation et de la scolarisation. Toutefois le christianisme sera fortement africanisé avec l’introduction des instruments de musique africains dans les chorales et le développement des sectes (Harrisme, Christianisme Céleste, Papa Nouveau, Déhima…).

L’expansion fulgurante de l’écriture dans les sociétés africaines après les indépendances (à travers la scolarisation) a fortement contribué à éroder l’oralité sur le continent noir. Cette tendance s’est renforcée avec le développement des moyens modernes de communication (radio, presse écrite, télévision, internet etc.). Les traditionnalistes, archivistes de la mémoire collective sont de plus en plus rares et leur zone d’expression se réduit au milieu rural, sous la pression de l’urbanisation galopante. Les sources orales, bien que toujours présentes, sont de moins en moins sollicitées dans l’écriture de l’histoire. Les sources écrites, laissées surtout par les explorateurs et européens dans la période coloniale sont les plus prépondérantes dans la recherche historique africaine actuelle.

La vocation de griot ne reflète plus aujourd’hui le prestige et la charge historique que revêtait cette fonction dans l’Afrique traditionnelle. Dans plusieurs sociétés africaines actuelles, les griots se limitent à produire des éloges à l’égard de personnalités publiques ou politiques. La dimension généalogiste ou ambassadeur de cette fonction a aujourd’hui quasiment disparu.

Au des diverses expressions culturelles, il faut noter que la colonisation a entraîné une dégradation de l’identité culturelle de l’Afrique. Les pratiques culturelles ont été bafouées, les objets culturels surtout les masques ont été désacralisés et pillés par les colons. Après les indépendances, l’urbanisation galopante, la modernisation du niveau de vie et surtout la christianisation de la société ont progressivement entraîné l’abandon de certains pratiques culturelles et artistiques comme les danses de masques, la sculpture, les fêtes traditionnelles, les cérémonies initiatiques etc. dont la zone de pratique se réduit au milieu rural. L’art moderne (la musique, la danse, la peinture…) s’impose dans les sociétés actuelles. L’habillement, la consommation, le divertissement ont perdu leur africanité et sont de plus en plus inspirés par la société moderne occidentale.

Conclusion

L’Afrique a subi de profondes mutations dans son organisation politique, sociale, économique et culturelle avec la colonisation. Ces bouleversements vont s’accentuer avec les indépendances entraînant une perte de l’identité culturelle de l’africain. Cette rupture de l’africain avec ses fondements traditionnels et sa dynamique volonté de s’occidentaliser n’explique-t-elle pas son incapacité chronique à se repérer et à s’insérer de façon responsable et autonome dans la civilisation moderne actuelle ? 

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